Deux premières parutions scientifiques avec l'ENS pour Axel Gomez

Ses travaux de chimie publiés dans ACS Catalysis et Science

Deux publications dans des revues scientifiques prestigieuses en l'espace de 3 mois ? C'est le beau doublé réalisé par Axel Gomez, élève en 3e année au département de chimie de l’ENS. Les travaux de ses deux stages d'études font aujourd’hui l’objet de publications, associées à l’ENS-PSL, dans ACS Catalysis et dans Science.
axel gomez
Axel Gomez

Mise à jour : Le 4 juin 2020, la prestigieuse revue Science publiait un article auquel Axel Gomez a contribué lors de son stage de Master 1 au sein du groupe de Pavel Jungwirth à l’Institut de chimie organique et de biochimie (IOCB) de l'Académie tchèque des sciences (Czech Academy of Sciences). Intitulé Photoelectron spectra of alkali metal–ammonia microjets: From blue electrolyte to bronze metal, l'équipe éditoriale de la revue l'a également choisi pour faire la couverture de l'édition du 5 juin (plus de détails avec l'interview d'Axel Gomez dans l'encadré en fin d'article).

 

Comprendre la structure des zéolithes pour produire des molécules énergétiques

C’est au cours de son stage de 3e année de licence à IFP Énergies Nouvelles (IFPEN)1 auprès de Céline Chizallet, qu’Axel Gomez a eu l’opportunité de participer au projet Laureline Treps, sur l’étude des zéolithes. L’article publié dans ACS Catalysis résulte de ce travail.

« Nous avons étudié les zéolithes. Il s’agit de solides composés d’alumine et de silice qui sont utilisés à l’échelle industrielle (raffinage, pétrochimie, transformation de la biomasse, dépollution automobile…) comme catalyseur. On a cherché à comprendre comment les conditions d’utilisation industrielle modifient les zéolithes, quelles structures, quels enchaînements d’atomes vont être présents en surface et pourront participer à des réactions chimiques. » explique Axel Gomez.

L’acidité de certains groupes de zéolithes, notamment ceux impliquant des atomes d’aluminium, est une propriété très utilisée. Elle permet aux zéolithes d’activer certaines réactions d’isomérisation2 par exemple. Avec Laureline Treps, doctorante au moment du stage d’Axel, ils se sont concentrés sur des surfaces cristallines d’une zéolithe couramment utilisée dans l’industrie et ont cherché à déterminer la stabilité et la force des sites acides.

Les zéolithes sont impliquées dans le vaste réseau de réactions permettant la production de molécules énergétiques, leurs applications sont surtout dans le domaine du raffinage et de la pétrochimie. « En ayant une meilleure idée de la structure des zéolithes, on peut imaginer rationaliser les réactions chimiques lorsque ces nano-cristaux sont présents. On peut comprendre quel chemin réactionnel va être privilégié grâce aux zéolithes, quelles réactions vont vraiment se produire, à quelle vitesse » explique Axel Gomez.

zéolithes
Cristaux de zéolithe, vus au microscope électronique

Vers la production de biocarburants à partir de matière organique

Durant son stage, l’étudiant-chercheur a également étudié les mécanismes réactionnels de production d’énergie des zéolithes, avec un autre doctorant, Jérôme Rey. En croisant ces recherches avec celles menées par Laureline Treps, « il devient alors possible d’adapter la structure de la zéolithe à l’objectif recherché de manière éclairée. Axel Gomez détaille : dans un monde où les ressources énergétiques fossiles sont loin d’être inépuisables, cela peut permettre, à partir d’hydrocarbures (de pétrole par exemple) de produire plus de molécules utilisées par l’Homme, d’avoir moins de sous-produits inutilisés ou des produits peu efficaces énergétiquement. » Ces procédés peuvent également être adaptés à la production de biocarburants à partir de sources très disponibles : de la matière organique, des déchets verts par exemple, et non des ressources fossiles qu’il faut prélever en profondeur dans le sol. Dans l’industrie, ces mêmes zéolithes sont aussi envisagées comme intermédiaires chimiques pour la transformation de molécules oxygénées...

Pour cerner les échelles moléculaire et atomique du monde, la chimie offre un grand nombre de moyens, mais observer comment bougent réellement les atomes n’est pas simple. Pour y parvenir, Axel Gomez s’appuie sur des principes de chimie théorique et réalise des simulations qui permettent de voir les atomes et les molécules dans cet environnement simulé. Ces expériences numériques, avec leurs paramètres et approximations contrôlées, apportent des informations différentes de celles en laboratoires, plus traditionnellement associées à l’image de la recherche en chimie. Axel en stage de M2 à l’ENS-PSL indique ainsi : « Avec Damien Laage, du département de chimie au laboratoire PASTEUR., je m’intéresse actuellement à différents systèmes, le proton H+ dans l’eau. J’ai aussi étudié la solvatation dans l’ammoniac liquide des métaux alcalins tels que le lithium, sodium et potassium l’an dernier, en stage de M1 à Prague, avec Pavel Jungwirth, de l’Institut de chimie organique et de biochimie (IOCB) de l'Académie tchèque des sciences (Czech Academy of Sciences). ».

 

« Un plaisir de comprendre le fonctionnement de ce qui nous entoure »

Pour Axel Gomez, c’est le genre de recherches qu’il a menées jusque-là qui contribuent à rendre la chimie fascinante. « Elle intervient dans de nombreux domaines : l’énergie, la santé, les objets biologiques à l’échelle moléculaire, etc. C’est la science de la matière, des transformations, ce qui est très large et que je trouve vraiment intéressant. J’ai choisi la chimie pour acquérir les bases moléculaires du fonctionnement du monde et je me suis orienté vers la recherche en réalisant qu’il y avait énormément de questions ouvertes sur les objets chimiques. Ces questions peuvent même porter sur des objets en apparence extrêmement simples comme l’eau, ou plus complexes comme peuvent l’être certains médicaments. Toutes n’ont pas nécessairement d’applications immédiates mais cela ne me dérange pas car c’est un plaisir de comprendre le fonctionnement de ce qui nous entoure. »

S’il se destinait d’abord au métier de vétérinaire, c’est en classe préparatoire BCPST (Biologie, Chimie, Physique et Sciences de la Terre) qu’Axel Gomez s’est découvert une passion pour les sciences fondamentales. « J’avais fait beaucoup de biologie mais je souhaitais comprendre plus en détail le fonctionnement de la matière à des échelles atomiques, moléculaires. » Actuellement en 3e année au département de Chimie de l’ENS-PSL, il suit en parallèle le Master 2 de chimie de Paris Centre (Sorbonne Université, PSL), parcours CAPT (Chimie analytique, physique et théorique).

Pour Axel, le chemin de la recherche demande beaucoup d’investissement personnel. Comme il est souvent parsemé d’obstacles qui paraissent infranchissables, il est indispensable d’être à la fois curieux et patient. « Pour trouver des éléments de réponses à certaines questions, et convaincre la communauté scientifique de la validité de nos conclusions, il faut avoir le courage de s’intéresser à une question très en détail, de batir une argumentation solide et détaillée». Mais loin de regretter son choix, il conclut avec enthousiasme : « en chimie comme dans d’autres disciplines, la satisfaction de comprendre un peu plus un aspect du monde qui nous entoure vaut largement tous ces efforts. »

1 IFPEN est le successeur de l’Institut français du pétrole (IFP).

2 L’isomérisation est la transformation d’un composant chimique en un isomère, c’est-à-dire en un composant qui est formé de mêmes éléments dans les mêmes proportions, mais qui présente des propriétés différentes. Exemple : L'isomérisation du glucose en fructose.

 

Bibliographie :
Environment, Stability and Acidity of External Surface Sites of Silicalite-1 and ZSM-5 Micro and Nano Slabs, Sheets, and Crystals
Auteurs : Laureline Treps, Axel Gomez, Theodorus de Bruin et Céline Chizallet ACS Catalysis, 23 janvier 2020

 

Mise à jour : un deuxième article publié dans la revue Science le 4 juin 2020 pour Axel Gomez.
Dans cette courte interview ci-dessous, l'étudiant scientifique revient sur ce doublé prometteur pour la suite de sa carrière et nous fait part de ses impressions, entre étonnement et gratitude pour les équipes qui l'ont encadré dans son travail.
 

Vous avez été contributeur pour deux articles scientifiques publiés en moins de 3 mois, dont un dans la prestigieuse revue Science. Quelles sont vos impressions ?
« Je suis très heureux d’avoir eu mi-mars un article publié dans ACS Catalysis suite à mon stage de troisième année de licence, et maintenant un article dans Science sur mon stage de M1, un délai très court entre ces deux articles qui est un véritable hasard de calendrier. Cette satisfaction est intellectuelle, puisque ces publications témoignent de la rigueur des travaux effectués et de leur acceptation par la communauté scientifique, mais aussi personnelle. J’éprouve une certaine fierté et de la gratitude d’avoir pu participer à ces projets aux thématiques assez différentes en chimie théorique. Je remercie Céline Chizallet (stage de L3) et Pavel Jungwirth (stage de M1) de m’avoir accueilli pour mes stages. »

 

Comment aviez-vous choisi ce stage de Master 1 ? Saviez-vous qu'il pourrait déboucher sur une publication scientifique ?
« À mon entrée en M1, je souhaitais découvrir un autre aspect de la chimie théorique, par rapport à ce que j’avais fait en L3. En discutant avec Damien Laage, professeur de chimie à l’ENS et avec qui je suis maintenant en stage de M2, il m’a conseillé le groupe de Pavel Jungwirth à Prague. Je m’y suis rendu quelques jours fin septembre 2018. C’est en échangeant directement avec tous les membres du groupe que j’ai choisi de m’orienter vers ce sujet. J’ai été séduit par l’objet d’étude : les électrons solvatés dans l’ammoniac liquide, que je ne connaissais pas du tout, ainsi que les méthodes de chimie quantique que nous projetions de mettre en œuvre. Mon projet personnel de stage portait sur l’effet des cations alcalins (Li+, Na+, K+) sur les électrons solvatés. Je ne pensais pas du tout que ça aboutirait à une publication aussi globale sur le sujet, avec une partie expérimentale importante et un apport très intéressant des calculs de chimie théorique. Et j’imaginais encore moins que ça puisse déboucher sur un article dans Science qui en plus a fait la couverture ! »

 

En quoi ces publications vont-elles influer sur la suite de votre parcours universitaire et votre orientation ?
« Dans un premier temps, cela me conforte dans mon envie de continuer en recherche. C’est déjà ce que je souhaitais faire, et ces deux publications ne peuvent que m’inciter à continuer. Je vais poursuivre en thèse à l’issue de mon master que j’achève cette année. Je ne peux qu’espérer persévérer dans cette lancée à l’avenir, avec de nombreuses publications, dans les meilleurs journaux possibles. Et je pense que ces articles auront un impact positif important d’ici quelques années sur ma carrière de jeune chercheur. »

 

Bibliographie :
Photoelectron spectra of alkali metal–ammonia microjets: From blue electrolyte to bronze metal
Auteurs : Tillmann Buttersack, Philip E. Mason, Ryan S. McMullen, Christian Schewe, Tomas Martinek, Krystof Brezina, Martin Crhan, Axel Gomez, Dennis Hein, Garlef Wartne, Robert Seidel, Hebatallah Ali, Stephan Thürmer, Ondrej Marsalek, Bernd Winter, Stephen E. Bradforth, Pavel Jungwirth. - Science, 4 juin 2020