Les réponses technologiques à la Covid-19 : les inégalités dans l'angle mort

Conférence inaugurale de Karine Gentelet, Professeure invitée de la chaire Abeona/ENS/OBVIA

La numérisation du social est croissante et au travers des informations de santé ou des prestations gouvernementales en ligne, de la télémédecine ou encore des applications de traçage de contacts, elle est au premier plan dans la gestion de la pandémie mondiale.

Sommes nous tous égaux dans l'accès au numérique ? Ces inégalités technologiques sont-elles corrélées aux inégalités de santé observées durant la pandémie ? Pour cette conférence, Karine Gentelet, professeure agrégée de sociologie, titulaire 2020-2021 de la Chaire Abeona-ENS-PSL-OBVIA (Université Laval) passera en revue un certain nombre d’angles morts touchant les liens entre inégalités numériques et inégalités en santé. Suivra un échange avec Frédéric Worms, philosophe et directeur adjoint lettres de l'École normale supérieure.

Karine Gentelet
Karine Gentelet

Il est maintenant acquis que les risques d’exposition et de complication suite à une infection au virus de la Covid-19 touchent d’une manière disproportionnée les personnes socialement marginalisées, racisées ou encore vivantes en situation de précarité ou de pauvreté. Ces risques s’ajoutent aux facteurs de vulnérabilité accrue suite aux impacts socioéconomiques attribuables au contexte de crise. La pandémie ne soulève pas juste des enjeux de type sanitaire.

À ce titre, certains parlent d’ailleurs d’une « pandémie de l’inégalité ». Très tôt, on a ainsi pu mesurer les effets sociaux et humanitaires des mesures mises en place pour la contrôler et des effets parfois exponentiels d’exclusion, de marginalisation. Une exclusion et marginalisation qui s’appuient sur un certain nombre d’inégalités préexistantes à la pandémie, mais qui pourtant n’ont pas été considérées dans les réponses technologiques.

Pourtant, à l’ère de la numérisation croissante du social, il s’agirait de la première pandémie pour laquelle les réponses numériques jouent un rôle de premier plan (information de santé ou prestations gouvernementales en ligne, télétravail, télémédecine ou encore aux applications de traçage de contacts). Ces réponses traduisent une transition numérique accélérée sur une très courte échelle de temps, et ce, dans une diversité de secteurs. En contexte de distanciation sociale, l’accès et la capacité à utiliser des technologies deviennent ainsi d’une importance fondamentale.

Dans le cadre de cette présentation, Karine Gentelet passera en revue un certain nombre d’angles morts touchant les liens entre les inégalités numériques et les inégalités en santé. L’incapacité de traiter l’interconnexion entre ce que nous définissons comme le caractère multidimensionnel des fractures socionumériques a comme conséquence d’omettre des aspects structurant de la marginalité de certains groupes de population et, ce faisant, d’entrainer une invisibilisation de leurs caractéristiques et de leurs besoins spécifiques.

La présentation s’appuiera sur les résultats d’une recherche menée à l’été 2020 sur les réponses technologiques mises en place au Québec suite à la pandémie de COVID-19.

Evénement en ligne sur inscription ici

 

À propos de Karine Gentelet

Karine Gentelet, Ph.D., est professeure agrégée de sociologie au département de sciences sociales à l’Université du Québec en Outaouais et sera professeure invitée à l’Université Laval. Ses intérêts de recherche et ses publications portent sur la reconnaissance des droits des peuples autochtones, l’usage de la technologie numérique et l’intelligence artificielle au service de la justice sociale, l’éthique de la recherche en contexte autochtone et la responsabilité sociale des chercheurs.

Karine Gentelet est chercheure au Centre interuniversitaire de recherche et d’études autochtones (CIERA) de l’Université Laval, au Laboratoire de cyberjustice au sein duquel elle dirige un projet de recherche sur l’autonomisation par l’intelligence artificielle des populations marginalisées. Elle est également co-responsable de l’axe Relations internationales, action humanitaire et droits humains, au sein de l’Observatoire international des impacts sociétaux de l’intelligence artificielle et du numérique (OBVIA).
Enfin, Karine Gentelet est fortement engagée dans la promotion et la défense des droits de la personne auprès d’Amnesty International depuis 2007.

 

À propos de la Chaire Abeona - ENS-PSL

L’ENS-PSL et la Fondation de l’ENS ont inauguré en septembre 2019 une chaire de recherche en Intelligence Artificielle, imaginée pour une durée de trois ans, en partenariat avec la Fondation Abeona.
La chaire est portée par Gabriel Peyré (Directeur scientifique de la Chaire), chercheur CNRS au Département de mathématiques de l’École.

Elle est hébergée dans le nouveau Centre Sciences de Données de l’ENS-PSL et a pour vocation d’inviter à l’ENS chaque année une personnalité experte dans des domaines liés à l’intelligence artificielle et ses impacts sociologiques, éthiques et scientifiques. Les activités de recherche portent spécifiquement sur les biais et l’équité en intelligence artificielle et donnent lieu à des séries de séminaires destinés aux chercheurs comme aux étudiants et personnalités extérieures.

 

Mis à jour le 23/2/2023