« En chimie, il faut être suffisamment courageux pour proposer quelque chose, même si c’est faux »

Depuis toujours, Romana-Iryna Martyniak est à l’aise dans la chimie et se passionne pour l’étude des cristaux. Entre expériences de laboratoire, stages à l'étranger et engagement associatif, la normalienne parle avec engouement de son parcours tout en gardant à l’esprit son ambition de devenir scientifique.

Romana-Iryna Martyniak, dans le laboratoire de l'ENS
Romana-Iryna Martyniak, dans le laboratoire de l'ENS

La chimie, une spécialité qui a tout de suite intéressé Romana-Iryna et la projette dans un parcours universitaire prometteur. La jeune Ukrainienne obtient la mention d’excellence pour sa licence de chimie à l’Université de Lviv, après avoir terminé ses études secondaires alors qu’elle n’avait que seize ans.

La chimie, une vocation

Un mélange de camphre, d’éthanol, de nitrate de potassium… Mais, surtout, un grand mystère qui plane autour du baromètre de Fitzroy. Intriguée par cet objet qui permet de prédire le temps, Romana-Iryna organise durant son lycée un petit laboratoire amateur chez elle. C’est entre expériences diverses de diffusion de lumière et de croissance de cristaux qu’elle trouve sa vocation. Elle s’aventure à un concours international de projets scientifiques entre élèves et gagne la première place : « Ce fut très inspirant pour moi : à la suite de ce concours, j’ai réalisé que c’était la chimie que je voulais et pouvais faire », affirme-t-elle.

Pendant une conférence, elle fait la rencontre de Daan Frenkel, chimiste néerlandais en simulation numérique au Département de chimie de l'Université de Cambridge. « C'est une personne très importante pour moi, qui m’inspire énormément », avoue-t-elle. Il la présente au directeur du département de chimie à l’ENS. Enthousiasmée par cette conversation, la chimiste en devenir obtient la bourse de la sélection internationale en Sciences 2020 qui lui permet de déménager à Paris pour son Master.

Rejoindre l’ENS avec un profil international

Romana-Iryna passe alors le concours en sélection internationale. « Le plus important, c’est d’exprimer et de défendre ses idées, il ne faut pas répéter les phrases des livres, mais montrer qu’on est suffisamment courageux pour proposer quelque chose, même si c’est faux. Parce que c’est ça, la recherche scientifique. On essaye, même si on se trompe : il faut toujours essayer, conseille-t-elle. Les professeurs valorisent le côté créatif et la logique, il faut savoir sortir des frontières conventionnelles », finit-elle par ajouter. C’est cette créativité et sa volonté qui lui ouvrent les portes de l’ENS en 2020. Cette première année, elle la qualifie volontiers de « compliquée » et en identifie aujourd’hui deux raisons principales.

Les professeurs de l’ENS valorisent le côté créatif, mais aussi logique, il faut sortir des frontières conventionnelles. »

D’abord, elle fait face à la barrière du langage. Un défi que l’Ukrainienne surmonte petit à petit grâce à des cours de français à l’ENS, mais qui l’empêche de suivre les cours classiques en chimie. « Il y avait un aspect énormément positif dans tout ça » : la proposition de l’École de faire trois jours par semaine de recherche scientifique en laboratoire, au lieu d’un seul. Sur le plan social, l’année 2020 a été, pour elle comme pour tous les étudiants, rythmée par le Covid et synonyme d’isolement. Elle a été marquée aussi par une rencontre : celle de son tuteur Antoine Tissot, qui lui apporte un soutien scientifique et moral. La normalienne déclare que travailler sous sa direction était : « La meilleure chose de l’année 2021. »

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Désormais en deuxième année de scolarité, Romana-Iryna s’intègre de plus en plus à l’ENS. Elle s’est notamment engagée avec d’autres normaliens dans la fondation d’une organisation pour venir en aide à l’Ukraine. Nourriture, vêtements ou encore médicaments sont transportés jusqu’au pays, en coordination avec d’autres organisations. Aux élèves ukrainiens qui arrivent à Paris, l’organisation propose également de la traduction et des cours d’adaptation pour faire face à la différence des programmes académiques.

Une multitude d’opportunités

En parallèle, les cristaux continuent à nourrir sa passion pour la chimie. Pourquoi une telle variété de structures cristallines ? Pourquoi à un moment donné, une structure cristalline se forme et pas une autre ? Romana-Iryna prévoit déjà de rédiger une thèse de chimie liée à la formation des états solides de la matière et envisage ensuite une carrière de scientifique : « Ce que je voudrais faire dans ma vie ? Travailler à la frontière de la matière molle et de la cristallographie. La nucléation des cristaux est un phénomène que l’on n’étudie pas assez. » Pour le moment, la chimiste poursuit un travail théorique sur le sujet, dans le cadre d’un stage de cinq mois en Suisse, car elle apprécie tout particulièrement les opportunités de stages offertes par l’École, notamment à l’étranger. « Je trouve que c'est quelque chose de formidable », finit-elle par affirmer avec joie.

Mis à jour le 23/2/2023