Covid-19 : Les normaliennes Ani Minasian et Claire Marie bénévoles à l’hôpital Saint-Antoine

Se rendre utile aux côtés de ceux qui cherchent et qui soignent

En plus des  cours à l’ENS-PSL et des examens de fin d’année, les deux étudiantes se sont portées volontaires auprès de l’hôpital Saint-Antoine, pour aider le personnel soignant dans la saisie de données liées à une étude sur le Covid-19. Un travail fastidieux mais essentiel pour comprendre la maladie.
Covid-19 : Les normaliennes Ani Minasian et Claire Marie bénévoles à l’hôpital Saint-Antoine
Ani Minasian (à gauche) et Claire Marie (à droite) entourent Wissam Boucenna, la clinicienne qui les accompagne dans leur mission.

Ani Minasian est en 3e année à l’ENS et en Master 2 de droit social, tandis que Claire Marie, en plus d’un Master 1 de littérature française, termine sa première année en histoire et théorie des arts tout en explorant d’autres disciplines comme la biologie. Suite à un appel à bénévolat de l’hôpital Saint-Antoine relayé par la direction des études de l’Ecole, toutes deux se sont portées volontaires sans hésiter pour aider les soignants pris dans la tourmente de la crise sanitaire.

 

Sélectionner et saisir les données des patients pour aider les chercheurs dans la lutte contre le Covid-19

« Depuis le début de l'épidémie, un certain nombre de mes amis ont choisi de mettre leurs compétences au service de la société – ainsi, plusieurs d'entre eux sont en études de médecine, et se sont engagés dans des maisons de retraite pour venir en aide au personnel soignant débordé par la situation, tandis que d'autres profitaient de leur formation d'ingénieur et du matériel de leur école pour produire des visières et les mettre à disposition des hôpitaux. Un dernier a choisi de venir en aide aux personnes sans-abris. Leur exemple m'a donné envie de me rendre utile à mon tour, dans la limite de mes capacités, et de contribuer aux efforts de tous ceux qui cherchent à atténuer les effets de la crise que nous traversons. » détaille Claire Marie pour expliquer son engagement.

Etudiantes en lettres et en droit, le type de soutien demandé par l’hôpital Saint-Antoine était tout à fait dans les compétences des deux étudiantes. Pour Claire Marie, le sujet de l'étude s’est même révélé être en relation avec son cours de biologie moléculaire.
En binôme, elles ont été ainsi chargées de saisir les différentes informations contenues sur des pancartes infirmières des patients atteints du Covid-19 (la température, l’état de conscience, les modalités de respiration et de ventilation, les analyses sanguines et urinaires détaillées…) dans une base de données spécialement conçue pour les études cliniques. Cette base centralise entre autres les études portant sur le Covid-19, communes aux différents hôpitaux français et permet aux chercheurs de disposer des données nécessaires pour analyser le virus et ses effets. Les deux jeunes femmes doivent également assurer la transposition d’informations contenues dans la base de données propre à l’hôpital Saint-Antoine vers celle regroupant toutes les études cliniques.  « Les annotations retenues ne sont pas toujours les mêmes dans les deux bases, mais nous avons à présent pris l’habitude et sommes plus rapides dans la saisie. Par ailleurs, lorsqu’il existe différentes mesures d’un même paramètre pour un jour donné, il faut choisir la donnée la plus “intéressante”, c’est-à-dire la plus anormale. » explique Ani Minasian.

 

Une mission qui libère du temps aux soignants pour s’occuper des patients

Un travail fastidieux mais qui, effectué à deux, permet aux bénévoles d'être efficaces : « en une journée, nous avons le temps de remplir la fiche d'information d'un patient hospitalisé en réanimation depuis deux mois environ précise Claire Marie. C'est dire combien la saisie est chronophage pour le personnel hospitalier, qui est en plus sollicité par son travail auprès des patients. »
Cela a d’ailleurs fait prendre conscience à Ani Minasian de la quantité de données dont il faut tenir compte dans la compréhension du Covid-19 ainsi que du temps que prennent leur collecte et leur saisie : « il ne s’agit là que d’un travail en amont, mais celui-ci est indispensable pour permettre une recherche clinique de qualité. Il faut s’assurer de disposer d’un maximum de données, les plus précises et les plus complètes possibles, sur une multitude de paramètres, afin de pouvoir réellement comprendre le Covid-19. Or il y a encore de nombreuses inconnues et de points d’ombre, encore aujourd’hui. »
Avec recul, l’étudiante rajoute : « je pense que cela invite à une forme de prudence et d’humilité face aux limites de la connaissance humaine. Mais le travail des médecins, des infirmiers et des équipes de recherche clinique est immense et il ne peut que susciter l’admiration et entretenir l’espoir de vaincre la pandémie. »  Un point de vue que Claire partage : « la fréquentation de l'hôpital en cette période de pandémie m'a permis de réaliser concrètement ce que vivait le personnel soignant qui s'est battu pour sauver des vies dans des circonstances exceptionnelles. »

Les deux normaliennes ont commencé leur mission de bénévolat après le pic de la crise et comptent bien la poursuivre après le déconfinement. À l’hôpital, elles ont eu l’occasion d’échanger avec les membres de l'équipe sur leur vécu : « nous avons ainsi appris qu'il avait fallu fermer certains services comme la cardiologie pour augmenter les espaces dédiés à la réanimation ! Les gestes que les soignants nous demandent d'adopter – port du masque, manière de l'ajuster, usage fréquent de désinfectant – sont littéralement vitaux pour eux, et nous ont convaincues de leur importance pour tout citoyen. »

 

L’importance de l’humain, dans la médecine et ailleurs

Et malgré la charge de travail immense des soignants, Claire et Ani se sentent entourées et épaulées dans leur mission par le personnel de l’hôpital, très compréhensif vis-à-vis de leurs impératifs étudiants : « nous avons la chance d'être accueillies par une équipe bienveillante, qui considère que notre aide ne doit pas porter préjudice à nos études, témoigne Claire. Evidemment, il y a beaucoup d’imprévus en ces temps de crise – l'hôpital n'est pas toujours disponible les mêmes jours d'une semaine à l’autre, et mes heures de cours ne correspondent pas tout à fait à celles d’Ani – mais nous faisons de notre mieux pour être présentes autant que possible. Pour ma part, il m'est arrivé de manquer un cours pour cette raison, mais les professeurs se sont montrés plein de sollicitude, et j'ai pu le rattraper par la suite. »

Une gentillesse et un dévouement de personnes qui font passer la vie des autres avant la leur, que Claire va jusqu’à étendre au-delà du personnel médical : « je suis toujours émerveillée par la manière dont les temps de crise remettent la solidarité au premier plan, et sont aussi l'occasion de redonner du sens à la notion de fraternité. Je pense bien sûr aux soignants, mais aussi à ceux qui prennent du temps pour appeler des personnes seules de leur entourage, ou qui apportent les courses à leur voisine âgée afin de lui éviter tout contact avec le virus... La beauté de ces intentions me remplit d'espérance, en dépit de tout ce que la pandémie comporte de négatif et de préoccupant. »