Unicellulaires, mais pas solitaires

The ISME Journal

"It is interesting to contemplate a tangled bank" – Charles Darwin
 
L’océan est un immense réservoir de biodiversité, dont la majorité est invisible à l’œil nu : le plancton. A l’image des sociétés humaines, les organismes du plancton ne vivent pas isolés les uns des autres, mais forment plutôt un vaste réseau social. Ses interactions forment le ciment de l’écosystème et déterminent la structure biologique de cette « toile de la vie ». Toutefois, leur étude a longtemps été confinée aux laboratoires, sans bien savoir comment les visualiser dans leur environnement naturel.

La publication de chercheurs dont Flora Vincent et Chris Bowler de l'Institut de Biologie de l’Ecole Normale Supérieure (IBENS),  parue le 18 janvier 2018, dans le journal ISME,  met en lumière l’importance d’une interaction biotique entre la diatomée Fragilariopsis doliolus, une micro-algue qui dérive avec le courant, et plusieurs espèces de tintinnides, planctons unicellulaires munis de « cils » grâces auxquels ils se déplacent. A l’aide de la microscopie à haute résolution, les auteur-e-s illustrent une adaptation unique de la diatomée, capable de se diviser pour former un anneau autour des différentes espèces de tintinnides.
En collaboration avec des scientifiques brésilien-ne-s, les auteur-e-s ont ainsi découvert que la diatomée pouvait être transportée par les tintinnides pendant leurs déplacements, tout en faisant office de « carapace » contre des prédateurs potentiels. 

Légende visuel: Figure 1 : Light, electron, and confocal laser-scanning microscopy observations of Fragilariopsis–Salpingella associations and interface.

Grâce à l’étendue géographique des données récoltées pendant Tara Océans, la chercheuse Flora Vincent a ainsi observé l’association de l’Afrique du Sud jusqu’à la Californie, en passant par le Brésil ou encore le Pérou ! Enfin, cette publication dévoile le caractère inédit de cette diatomée, une des plus abondantes dans l’océan actuel, et pourtant très peu étudiée.
 
Ces travaux marquent leur originalité par l’intégration d’une grande diversité de type de données : microscopie à haute résolution, génétique, facteurs environnementaux, enregistrement live mais aussi par la diversité des échelles qu’ils embrassent : de la cellule unique à l’océan global. Ils signent le résultat d’une collaboration entre divers équipes interdisciplinaires en France ainsi qu’à l’étranger.