« L’expérience de l’ENS va bien au-delà des salles de cours et des bibliothèques »

Entretien avec Dorothée Butigieg, nouvelle responsable de la vie étudiante

Après avoir été directrice des études Lettres de l’ENS , Dorothée Butigieg devient à partir de la rentrée la toute première responsable de la vie étudiante de l’École. Son champ d’action ? Tous les sujets liés à la vie des normaliens, des mastériens et des doctorants qui peuvent avoir un impact sur leurs études et leur vie dans l’établissement. Elle détaille dans cet entretien les contours de ce nouveau rôle.
Dorothée Butigieg, nouvelle responsable de la vie étudiante
Dorothée Butigieg, nouvelle responsable de la vie étudiante

Vous êtes depuis cette rentrée la toute première responsable de la vie étudiante de l’ENS-PSL. Qu’est-ce qui vous a amenée à assurer cette mission ?

Je m’occupe de la vie étudiante depuis ma nomination comme directrice des études lettres, car la direction des études, avant même de devenir l’actuelle direction des études et de la vie étudiante (DEVE), a toujours traité ces sujets, la vie étudiante étant de fait étroitement mêlée à la scolarité et aux projets des étudiants et des étudiantes.
Les questions liées à la vie étudiante sont nombreuses et variées, et les projets et les collaborations se multiplient. Le constat que j’ai partagé ces derniers mois avec Clotilde Policar, directrice des études sciences, est clair : l’équipe de la DEVE doit être renforcée pour répondre au mieux aux besoins des étudiants de l’École.
J’ai donc proposé à la direction de l’ENS de me consacrer pleinement à la vie étudiante, et c’est Roland Béhar (lire son portrait ici) qui me succède au poste de directeur des études pour les lettres et sciences humaines et sociales. Si je suis désormais chargée des sujets de vie étudiante, je travaillerai toujours en étroite collaboration avec les deux directeurs des études lettres et sciences. Je suis par ailleurs missionnée par la direction pour réfléchir dans les prochains mois à la structuration de l’accompagnement des étudiants pour les stages et l’insertion professionnelle.

En quoi consiste cette mission sur les stages et l’insertion professionnelle ?
Il s’agit de réfléchir à la façon de développer et de mieux suivre les stages que font les étudiants dans le cadre de leur diplôme : si les stages de recherche des étudiants scientifiques sont déjà parfaitement encadrés par les départements, il nous faut proposer un accompagnement renforcé à tous les étudiants, en particulier littéraires, dans leur recherche de stages, mais aussi étoffer l’offre de stages et la rendre plus visible. Sur le front de l’insertion professionnelle, nos étudiants ont déjà des interlocuteurs et des services pour les aider dans leur réflexion sur leur avenir professionnel, mais les dispositifs d’information sur les débouchés et les carrières, académiques et non-académiques, pourraient être plus développés et mieux structurés.

Quels sont les périmètres d’action d’une responsable de la vie étudiante ?
Cela revient à se demander ce qu’est la vie étudiante, c’est une question difficile ! Il s’agit à mon sens de tous les sujets liés à la vie des étudiants (normaliens, mastériens, doctorants) qui peuvent avoir un impact sur leurs études et leur vie dans l’établissement. Les questions de santé bien sûr, les conditions matérielles dans lesquelles se déroulent les études, mais aussi les relations entre étudiants, ou encore leur situation familiale. L’École mais aussi l’université dont elle fait partie, PSL, mettent de nombreux dispositifs au service des étudiants – encore faut-il les connaitre, et penser à (voire oser) les utiliser.

Sur quels sujets les étudiants peuvent-ils vous solliciter ?
La responsable vie étudiante est une interlocutrice qui écoute, oriente, conseille. Elle prête une attention spécifique aux étudiants internationaux, en particulier lors de leur arrivée à Paris, pour les accueillir et veiller à leur intégration. Tout cela en étroite collaboration avec le très dynamique service vie étudiante de PSL et son Welcome Desk.
Elle accompagne également les associations étudiantes du campus (Comité d’organisation des fêtes, Bureau des sports, Bureau des arts, Délégation générale, Ecocampus, etc.), pour les aider dans leurs activités et leurs projets, et organiser ensemble les temps forts de l’année, comme la rentrée ou la journée Portes ouvertes.

Comment appréhendez-vous cette rentrée et plus globalement cette année à l’École ?
Nous avons tous et toutes hâte de nous retrouver, dans les salles de classe et les amphis mais aussi dans le restaurant, le gymnase, le théâtre... Cependant, nous allons être plus que jamais attentifs au bien-être de nos étudiants : beaucoup d’entre eux ont été profondément déstabilisés par la crise sanitaire et ses conséquences, et les répercussions sur leur santé physique et mentale, parfois sur leur situation familiale ou financière, sont potentiellement durables.
Il y a également de vrais défis à relever du côté de la vie associative de l’École : la diversité et le dynamisme des activités sur le campus ne seront préservés que si des étudiants sont motivés pour reprendre le flambeau des clubs et associations. Espérons qu’ils seront nombreux et créatifs !

Quels conseils pouvez-vous donner aux nouveaux normaliens et normaliennes ?

Nos étudiants sont tous des élèves brillants, qui aiment travailler, et ils vont pouvoir s’en donner à cœur joie à l’École. Mais l’expérience de l’ENS va bien au-delà des salles de cours et des bibliothèques : les activités culturelles, sportives et festives sont autant d’occasions de rencontres, d’opportunités d’explorations et d’épanouissement. Il serait vraiment dommage de passer à côté de toutes ces possibilités, mais il ne faut pas pour autant se disperser et se surcharger !
Il est en effet essentiel de garder du temps pour soi, du temps pour lire, pour flâner, pour réfléchir aussi, en particulier à son avenir et à ses projets professionnels. La période des études à l’ENS est évidemment synonyme d’orientation, elle est faite de choix et de renoncement, et il ne faut pas sous-estimer le temps et l’énergie que cette réflexion nécessite.

Responsable de la vie étudiante, vous enseignez aussi l’anglais. Pouvez-vous nous parler de vos cours ?

L’un des grands avantages d’enseigner les langues au sein d’une institution comme l’ENS est la grande liberté de contenus et d’approches possibles. J’essaie de varier au maximum les publics d’étudiants ciblés par mes cours : mon cours de debating attire plutôt des étudiants très à l’aise en anglais, qui ont envie de pratiquer la langue de façon résolument différente, alors que mon cours Oral expression for dummies est destiné à aider des étudiants très intimidés par la prise de parole en anglais.
Je prépare par ailleurs avec deux collègues, dont un journaliste du New York Times, un nouveau cours au second semestre. Destiné en priorité aux normaliens et normaliennes du parcours politiques publiques, il permettra aux étudiants de s’immerger dans l’univers des médias et en particulier de la presse écrite, avec un objectif clair : les aider à plonger avec délice, chaque matin, dans la lecture de la presse anglophone…
J’accompagne également le groupe de traduction My ENS in English, fondé l’an dernier par trois étudiantes en programme d’échange. Constitué par des anglophones natifs et de bons anglicistes, le groupe traduit toutes sortes de documents comme des mails, pages web, menus de la cantine… pour aider les étudiants internationaux à mieux connaitre l’ENS-PSL et s’y sentir parfaitement intégrés.
Je suis coach de l’équipe de debating de l’ENS, qui participe depuis maintenant 15 ans au tournoi annuel de la French Debating Association. Un tournoi qui a pu avoir lieu l’an dernier, à distance – et qui s’est d’ailleurs conclu par une magnifique victoire de l’équipe de l’ENS, qui a su convaincre le jury de la finale de rejeter la motion Mistakes are the portals of discovery.

Quel a été votre parcours jusqu’à aujourd’hui ?
Après deux belles années de classes préparatoires au lycée Lakanal de Sceaux, je suis entrée à l’ENS de Cachan, actuelle ENS de Paris-Saclay, au département d’anglais. Je me pensais résolument civilisationniste, et m’y suis découvert une passion pour la linguistique et l’analyse de discours.
J’ai commencé à travailler à l’ENS lors de la mise en place des masters et de l'intégration des cours de langues dans tous les cursus, l’année de la création de l’Espace des Cultures des Langues d'Ailleurs (ECLA). Tout était à construire, ce fut une aventure passionnante, menée par une équipe très dynamique.
J’ai été ensuite directrice des études d’ECLA puis sa directrice. Ces expériences m’ont montré que ce genre de responsabilités n’est pas aussi rébarbatif qu’on le croit, bien au contraire. Organiser, coordonner, monter des projets : autant de tâches qui constituent un excellent complément à ce que j’aime faire par-dessus tout : enseigner. Je continue à conjuguer ces deux aspects depuis 2017, date à laquelle j’ai rejoint la DEVE.